Ce printemps, le cœur artistique de Paris bat au rythme la création contemporaine du continent africain. Depuis quelques années déjà, on pressentait un certain engouement. Timide, confidentiel tout d’abord, et aujourd’hui tout à fait affirmé. Alors que les premières ventes commencent à faire tourner des têtes du côté des acteurs du marché, le grand public ne reste pas en marge du phénomène. « Art/Afrique : le nouvel atelier » à la Fondation Louis Vuitton, « Le jour qui vient » aux Galeries Lafayette, « Afriques capitales » à la Grande Halle de la Villette et la Gare Saint-Sauveur de Lille… bref, autant d’événements qui témoignent de cette effervescence.
S’agit-il d’un véritable boom ou d’une simple bulle pour initiés, comme l’art contemporain a souvent su en produire ? Il est en tous cas certain que cet enthousiasme pour la création contemporaine africaine interroge.
Ce phénomène n’a pas non plus manqué de nous interpeller. A travers ce dossier, nous avons croisé des regards, des engagements artistiques et esthétiques pluriels. La création contemporaine africaine est en effet à l’image d’un continent hybride, en perpétuelle mutation. Les artistes s’inspirent à la fois des tensions passées et des enjeux futurs en faisant de celles-ci un terreau fertile pour la création. De cette manière, ils s’affirment chaque jour un peu plus sur une scène internationale qui les a pendant bien trop longtemps boudés, voire totalement ignorés.
Cette nouvelle visibilité de l’art contemporain africain ravive également, dans son sillage, certains débats sémantiques et éthiques liés à d’épineuses questions de légitimité. Ce printemps, c’est en particulier le musée du Quai Branly qui relance les discussions, à propos notamment de ses choix muséographiques et de ses titres d’expositions.
Dès lors, ce sont aussi les relations délicates qu’ont entretenus (et qu’entretiennent encore) l’Afrique et l’Occident qui sont au cœur des préoccupations. La scène artistique en perpétuelle expansion du continent parvient aujourd’hui à rééquilibrer le rapport de force. Gageons qu’elle n’ait plus besoin de crier haut et fort « j’existe » pour garantir sa visibilité en Occident.
Plus qu’un état des lieux de la création contemporaine africaine, ce dossier est avant tout une exploration par l’image et par le son de cet engouement. Il multiplie les regards, croise des points de vue singuliers sur ce qui, nous l’espérons, ne demeurera pas qu’un épiphénomène. L’art contemporain africain, par sa complexité et surtout sa richesse fait frémir le marché et les institutions. Un véritable coup de fouet pour des instances jusqu’ici sclérosées. Communicative, enthousiasmante, cette énergie donne à nous aussi, journalistes, l’envie de participer à l’écriture de ce nouveau chapitre de l’histoire de l’art.
Inès Boittiaux
Pour aller plus loin :
Une cartographie qui recense des centres contemporains et foires en Afrique